En 1968, lorsque James Brown a écrit les paroles de la chanson Say it Loud (I’m Black and I’m Proud), il estimait que l’affirmation identitaire était nécessaire dans les quartiers noirs américains. Martin Luther King venait d’être assassiné, et les États-Unis étaient déchirés par des tensions raciales. Or, cette chanson, qui représentait une source de fierté, a galvanisé de nombreux athlètes noirs.
Trois mois après la sortie du morceau du parrain de la musique soul, l’athlète afro-américain Bob Beamon a pulvérisé le record du saut en longueur aux Jeux olympiques (JO) de Mexico, avec une distance de 8,90 mètres.
Le poing levé du « Black Power », ou de l’égalité raciale ?
Les observateurs ont qualifié ce saut comme étant « le saut du siècle », et il a fallu 23 ans pour qu’un autre athlète afro-américain, Mike Powell, éclipse le record de Beamon.
D’autres athlètes noirs, comme George Foreman (médaille d’or à la boxe) et Jim Hines (médaille d’or et record du monde au 100 mètres), se sont distingués aux JO de 1968.
Toutefois, ce qui avait surtout retenu l’attention, c’était le poing levé du « Black Power » des sprinteurs Tommie Smith et John Carlos, terminant respectivement premier et troisième au 200 mètres. Ils se sont servis de la cérémonie des médailles pour protester contre la situation des Noirs dans le monde, notamment l’Apartheid en Afrique du Sud.
Bien que Smith et Carlos aient été dépouillés de leur médaille par le Comité international olympique (CIO), il n’en demeure pas moins qu’ils ont fait la fierté de la population noire dans le monde.
Cette histoire nous prouve bien que les Jeux olympiques ne sont pas apolitiques, mais bien une arme politique.
Or, aujourd’hui, quand je regarde les Jeux olympiques de Paris à la télé, c’est avec beaucoup de fierté que je constate à quel point les athlètes noirs dominent le sport olympique.
Les athlètes noirs, les dieux du stade
Qu’il s’agisse de Simone Biles en gymnastique, de Teddy Riner au judo ou de Mijain Lopez en lutte gréco-romaine, la domination des Noirs aux JO 2024 de Paris dépasse l’entendement.
Et notez que je me retiens d’inclure dans la conversation le nom d’Usain Bolt, qui est le seul athlète à avoir remporté trois titres olympiques au 100 mètres et deux titres au 200 mètres, en plus de détenir le record de ces deux épreuves.
Je n’ose pas non plus parler de ces autres dieux du stade, comme Jesse Owens, Carl Lewis, Edwin Moses, Jackie Joyner-Kersee, Alysson Felix, Donavan Bailey et Florence Grifith-Joyner, qui a fait vibrer le Stade olympique de Séoul.
Et vous m’excuserez si je ne retourne pas sur l’influence que Michael Jordan, Magic Johnson et Charles Barkley ont eue sur le parcours triomphal de la Dream Team, l’équipe de rêve du basketball américain, aux JO 1992 de Barcelone.
Restons dans la Ville Lumière !
Simone Biles. Chaque fois qu’elle s’exécute sur la poutre ou au sol, on retient notre souffle. On est stressé par la crainte de la voir commettre une erreur qui lui coûterait le podium.
Pourtant, ça ne devrait pas être le cas : avec ses 11 médailles olympiques et ses 23 titres mondiaux, Simone Biles est considérée comme la plus grande gymnaste de tous les temps.
Après avoir brisé le tabou de la santé mentale des sportifs de haut niveau en renonçant à des épreuves aux Jeux de Tokyo en 2021, elle est revenue en force à Paris pour continuer d’être une source d’inspiration pour les jeunes filles noires.
Une belle preuve de courage et de combativité.
Poursuivant cette réflexion, saluons également persévérance de la gymnaste afro-brésilienne Rebbeca Andrade et de la sprinteuse Julien Alfred, qui ont récolté la médaille d’or dans leur discipline.
Le judoka Teddy Riner et l’incrédulité des Japonais
Au judo, Teddy Riner, un Guadeloupéen, qui représente la France, a décroché un troisième titre olympique individuel (+100 kg) en battant le Sud-Coréen Kim-Ming Jong.
Cela fait depuis quelques années que Riner bouleverse le monde du judo. Même les Japonais, qui ont inventé ce sport, ne savent plus quoi faire pour venir à bout du colosse de 6 »8 » et 308 lb. Paraît-il qu’ils ont même mis sur pied un « projet » (un jeune de 22 ans) pour faire tomber Teddy Riner, qui est âgé de 35 ans.
Sur les réseaux sociaux, de nombreux amateurs critiquaient le style du champion olympique, allant jusqu’à évoquer son physique pour expliquer son succès.
Même son de cloche du côté des médias japonais, qui n’acceptent toujours pas que Teddy Riner ait concrétisé le sacre de la France à l’épreuve du judo par équipe aux JO 2024, qui philosophent sur les atouts physiques du judoka guadeloupéen.
Quant au judoka japonais Tatsuru Saito, qui a été battu par Teddy Riner, refusant même de rentrer à la maison : « Je ne pense pas retourner au Japon. J’ai honte et je suis frustré par moi-même », a écrit sur les réseaux sociaux celui que le pays du Soleil-Levant a formé principalement pour battre Riner.
Si les Japonais ressentent un sentiment de honte par le fait d’avoir été vaincus par un athlète noir, les Afrodescendants devraient fiers de la performance de Teddy Riner.
Et ce texte ne serait pas complet si je ne soulignais pas l’immense exploit de l’Afro-Cubain Mijain Lopez en lutte gréco-romaine (130 kg) : 5 olympiades, 5 médailles d’or pour la légende cubaine.
Lopez est devenu le premier athlète de l’histoire, toutes disciplines confondues, à remporter la médaille d’or sur la même épreuve en cinq éditions consécutives.
C’est ce qu’on appelle la domination sportive, et il n’y a pas de mal à célébrer l’excellence de ceux et celles qui nous ressemblent et avec lesquels nous partageons une histoire commune.
Tout le monde le fait.
Par exemple, un Québécois indépendantiste ne supporte pas le drapeau canadien, mais célébrera systématiquement le sacre d’un Tremblay de Drummondvillle qui représente le Canada aux Jeux olympiques.
Gens de la Communauté, si d’autres le font, pourquoi pas nous ?
Pour conclure, je ne crois pas au mythe voulant que la génétique soit liée aux résultats sportifs des Noirs.
Autrement dit, les hommes noirs et les femmes noires n’ont ni la course ni le basketball ou le football dans la boxe dans le sang.
Que ce soit sur le plan sportif, musical ou intellectuel, lorsqu’ils prennent part à des concours leur permettant de se distinguer, ils donnent le meilleur d’eux-mêmes.
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2 Commentaires
Je trouve que c’est une excellente Initiative que de célébrer ce phénomene mondial de la domination des Noirs aux jeux olympiques, qui va en s’emplifiant. Pour moi, un message se profile derriere ce phénomene. Les Noirs prennent toutes les nationalités possibles, pour toutes raisons possibles, et finissent Par porter toutes les nations du monde a la gloire olympique. Comme pour dire a la face du monde que le noir, le premier prototype humain, est celui qui a engendré tous les autres, ce que la science nous enseigne. Et donc qu’il est le mieux placé pour etre le trait d’union de toutes les composantes de l’humanité, un réconciliateur, en somme. Si l’évolution des JO nous donnent l’occasion de nous en rendre compte, tant mieux. Et dommage que les Japonnais préferent adopter une attitude qui devrait etre du passé aujourd’hui, trouvant inconcevable qu’un Japonais soit battu en Judo Par un Noir. Le racisme anti-noir devient de plus en plus ridicule. Plus ils domineront les JO, plus cela deviendra évident.
Mille mercis pour cet éloquent commentaire, Urbain N’Dakon. Vous avez tout dit. Vraiment.