Culture

On l’appelait le « Business », l’un des meilleurs clubs de l’histoire de Montréal


Dans les années 1970, le Lime Light et le 1234 représentaient des lieux incontournables des nuits montréalaises, mais aucun club n’aura marqué la métropole autant que le Business.

En fait, la « faune bigarrée » (Business), qui était située au 3500, boulevard Saint-Laurent, a indubitablement mis Montréal sur la carte.

En guise d’exemple de la popularité du bar Business, quand j’allais à Toronto, la première question que les gens me posaient lorsqu’ils savaient que je venais de Montréal était la suivante : « Can you get me in Club Business ? »

En effet, n’entrait pas qui le désirait dans le mythique bar Business.

Il fallait avoir un look unique, à savoir des cheveux aux couleurs variées, des jeans troués, des vêtements provenant d’un autre monde, bref un style caractérisant le genre musical de l’heure, dont la house.

À l’entrée de l’établissement, il n’y avait pas de file d’attente, mais plutôt une foule de gens qui s’agglutinaient sur le trottoir et une partie de la rue, au grand mécontentement des policiers. Chacun faisait un signe de la main aux portiers, dans l’espoir d’être choisi, de faire partie de ce système de clientélisme qui ressemblait à celui du légendaire club Studio 54, à New York.

Personnellement, pour une raison que je ne m’explique pas, dès la première fois que j’ai mis les pieds devant le Business, Wesley, le dieu de la place, qui était le Chef de la sécurité, est venu me chercher dans la foule pour me faire rentrer.

Et c’est ainsi qu’a débuté la belle aventure entre la faune bigarrée et moi.

Je me souviens des membres du personnel de sécurité du Business, comme Stéphane, aujourd’hui avocat, Daniel, Christian et bien d’autres.

Mais ceux avec lesquels je me suis lié d’amitié au fil des ans, c’étaient Charles Hennegan et Perry Carrington, qui avait l’air patricien, mais combien sympathique et solidaire. Pour moi, sa Harley-Davidson mauve, qui était souvent garée devant le Business, faisait partie du décor « flyé » et spectaculaire du club.

Le Business n’a duré que quatre ans. De 1986 à la fin de 1990. Toutefois, cette courte période a été suffisante pour que le club, qui a été fondé par les frères Holder, laisse son empreinte sur le territoire montréalais.

À l’intérieur du Business, une dépravation à la fois décomplexée et sophistiquée était palpable : toilettes mixtes où les pervers pouvaient espionner grâce aux fentes de portes en métal, fêtards déambulant torse nu et danses érotisées.

Sur la piste de danse, on vivait une expérience incomparable, une sensation de voyage dans la ville des vents (Chicago, lieu de naissance de la musique house) lorsque les D.J. André Girard et Laflèche nous faisaient découvrir les succès de Marshall Jefferson et de Franckie Knuckles.

Enfin, c’était un lieu qui rassemblait toutes les couches de la société. Un espace d’évasion qui a accueilli des célébrités telles que Madonna et Carole Laure.

Certes, en créant le bar Business, les frères Holder ont importé la musique house à Montréal.

Mais le plus important, c’est qu’ils ont servi d’inspirations à d’autres mouvements : le rave, le Sona et les Productions 514, des éléments qui ont transformé le visage de la métropole au milieu des années 1990.

Et à cette époque, Montréal était le cœur de la vie nocturne au Canada… et d’une partie de l’Amérique du Nord.


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Auteur

Gagnant du prix Rédacteur (rice) d’opinion aux Prix Médias Dynastie 2022, Walter Innocent Jr. utilise sa plume pour prendre position, dénoncer et informer. Depuis 2017, il propose aux lecteurs du magazine Selon Walter une analyse critique de l'actualité.

3 Commentaires

  1. Merci pour cet article si évocateur du Business. Un lieu important pour la musique house à Montréal.

    C’était l’époque des DJ Jams les vendredis soirs; 2 et même 3 DJ’s sur la même scène !

    Les samedis avec Tony Desypris, qui ramenait des vinyles directement de New York.

    Et surout, il faut rendre hommage au travail de Christian Pronovost.

    J’y ai entendu des pièces inoubliables; Urban Soul, « Alright », Ceybil Jeffries, « Love so special », Bas noir, « I’m glad you came to me », Alison Limerick, « Wher love lives », Those Guys, « Tonite ».

    La musique qu’on y jouait était infusée d’amour et d’inspiration, c’est peut-être pour cela qu’on oubliera jamais le Business.

  2. J’ai rencontré l’homme de ma vie là en 1990. Il était en visite de Toronto. On s’est marié en 1992 et vivons toujours ensemble. Nous avons eu deux merveilleux enfants, maintenant dans la vingtaine. Merci le Business!

    • Walter Innocent Jr. Répondre

      Wow ! Merci pour ce beau témoignage, Julie. Le Business : quel club !

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