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Lionel Carmant aurait dû quitter le Titanic de Legault depuis son déni du racisme systémique


C’est une question de portée nationale, et tout le monde en parle, même le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, s’en est mêlé : la loi spéciale sur la rémunération des médecins du Québec. Or, la démission du ministre Lionel Carmant, jeudi, a confirmé ce que plusieurs redoutaient : la réforme du premier ministre François Legault est une catastrophe politique annoncée.

Qu’est-ce qui a donc poussé le docteur Lionel Carmant, qui est d’origine haïtienne, à quitter le navire de François Legault ?

Par amour pour sa famille

Comme vous le savez, le 25 octobre, le gouvernement caquiste a adopté une loi spéciale qui réforme la rémunération des médecins et qui prévoit des amendes salées pour ceux et celles qui organiseraient des moyens de pression susceptibles de nuire aux services.

La dernière danse

Par exemple, à partir du 1er janvier, 15 % de la rémunération des médecins sera retenue. Parmi cette somme, 10 % seront liés à l’atteinte de cibles de performance nationales, régionales et locales, tandis que 5 % seront automatiquement redistribués entre les médecins d’un même groupe selon leurs priorités.

Ayoye, comme dirait mon ami Justin Tremblay !

Nul besoin de vous dire que, depuis l’adoption de cette loi (la loi 2), rien ne va plus dans les cliniques médicales ainsi que dans la maison de Lionel Carmant. Ce dernier s’est retrouvé pris entre l’arbre et l’écorce : sa femme et sa fille sont médecins.

D’ailleurs, sa fille, Laurence Carmant, a publié une lettre dans Le Devoir, où elle a évoqué l’idée de quitter le Québec si le gouvernement ne lui permet pas de pratiquer librement.

Le mécontentement exprimé publiquement par sa fille a été suffisant pour que Lionel Carmant comprenne qu’il devait se dissocier du gouvernement caquiste.

À mon avis, il a pris la bonne décision.

Après tout, la politique, c’est une chose, mais la famille c’est la famille. C’est là où la vie commence et où l’amour ne finit jamais, dit-on.

La communauté noire, une famille élargie

Cependant, force est de reconnaître que, il y a exactement cinq ans, le ministre des Services sociaux, Lionel Carmant, a fait la sourde oreille aux appels de ses frères et sœurs de la communauté noire, cette famille qu’il a négligée depuis qu’il est entré en politique.

Il ne s’agit pas ici de comparer l’attachement du ministre Carmant à la communauté noire avec l’amour qu’il éprouve pour son épouse et sa fille.

Non, pas du tout.

À l’approche des élections municipales, ce dimanche, j’estime qu’il est essentiel que la communauté noire se pose la question suivante :

Les candidats noirs sollicitent constamment les votes des membres de leur communauté, mais que font-ils réellement pour ces derniers durant les moments difficiles ?

Presque rien.

Dans l’affaire Mamadi Camara, qui avait été arrêté violemment et accusé à tort d’avoir tenté de tuer un policier, pas un seul mot.

Mais ils tentent, coûte que coûte, de nous convaincre qu’ils vont changer le système de l’intérieur.

Le 9 octobre 2020, plus de 470 professeurs d’université et professionnels de la santé ont dénoncé le fait que le premier ministre du Québec refuse de reconnaître le racisme systémique dans une lettre ouverte.

Indubitablement, la concomitance entre ces personnalités publiques avait placé Lionel Carmant au centre de l’éclaboussure. Mais malheureusement, celui-ci a préféré jouer le rôle du « Joyeux naufragé » dans le bateau de François Legault, qui s’est échoué sur une île déserte du déni systémique.

Le plus étonnant, c’est que, quelques mois auparavant, dans une entrevue au 98.5, à l’émission de Paul Arcand, Lionel Carmant avait admis avoir lui-même été victime de profilage racial, et que ses enfants ont subi le même sort.

C’était l’année du mouvement George Floyd, où tout le monde remettait en question certaines valeurs de la société occidentale.

À l’époque, Justin Trudeau, qui était le premier ministre du Canada, avait reconnu l’existence du racisme systémique, ce qui avait incité la mairesse de Montréal, Valérie Plante, et l’ex-maire de Québec, Régis Labeaume, à mettre le doigt sur le point sensible de la société québécoise.

L’immobilisme de certains élus noirs face au profilage racial

Or, pendant ce temps, à l’Assemblée nationale, le ministre Carmant et d’autres élus noirs de la CAQ fermaient les yeux et se bouchaient les oreilles sur ce sujet majeur.

Le racisme systémique ? Ni vu ni connu, d’après eux.

Et pourtant, ce matin encore, des lecteurs m’ont envoyé une vidéo où on peut voir deux hommes noirs faire l’objet d’une arrestation musclée, à Laval.

Une histoire redondante, dites-vous ?

Je réitère que Lionel Carmant a bien fait de choisir sa famille à son parti politique.

Pour conclure, chers élus noirs, il importe de savoir que les membres de la communauté noire, c’est votre sang, c’est une partie de vous.

De ce fait, vous êtes les mieux placés pour comprendre leurs réalités et leurs besoins particuliers.


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Auteur

Gagnant du prix Rédacteur (rice) d’opinion aux Prix Médias Dynastie 2022, Walter Innocent Jr. utilise sa plume pour prendre position, dénoncer et informer. Depuis 2017, il propose aux lecteurs du magazine Selon Walter une analyse critique de l'actualité.

4 Commentaires

  1. Jean-Gynse Bolivar Répondre

    Bonne analyse.
    Nous frères et soeurs ont souvent oublié. En Occident, un Noir est le Noir.

  2. Jean-Gynse Bolivar Répondre

    Bonne analyse.
    Nos frères et soeurs ont souvent oublié. En Occident, un Noir est le Noir.

  3. Encore une fois c’est un très bel article.
    Effectivement, lorsque ces élus noirs ont besoin de nous, ils nous sortent la fameuse expression: Lakay sé lakay.
    Dès lors qu’ils sont élus, ont les entend plus. Ils sont prêts à défendre toute autre cause sauf celle des communautés immigrantes et racisées. Ils ne voient pas, n’entendent pas et ne se positionnent pas ouvertement.

    Dans le cas de M. Carmant, une chance que sa femme et sa fille étaient là pour lui remettre les valeurs à la bonne place. Vous allez me dire: à coup de chantage. Il a probablement vu qu’il avait bcp à perdre en mettant sa famille à dos.

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