
Certes, il importe de ne pas se livrer à des conclusions hâtives au sujet de l’adolescent qui a été abattu par la police de Longueuil, mais n’avez-vous pas l’impression que l’histoire se répète ? De l’autre côté du fleuve Saint-Laurent, sur la Rive-Sud, cette fois. Quand ce n’est pas l’arrestation d’une femme noire atteinte d’AVC, c’est la mort d’un jeune racisé par les balles de la police.
Ces histoires d’horreur tourmentent de nombreuses personnes et elles rendent le sommeil presque impossible.
En fait, le drame survenu à Longueuil, dimanche, est le cauchemar de tous les parents, qu’ils soient Noirs, Blancs ou Arabes.


Un vide difficile à combler
Pensez-y un instant : vous êtes en train de regarder la télévision paisiblement à la maison, et quelqu’un frappe à la porte pour vous annoncer le départ de votre ado, sans qu’il ou elle ait eu le temps de vous dire au revoir.
Et on vous révèle que la police lui a tiré deux balles au corps, vous faites quoi ?
Dans votre esprit, la terre cesserait de tourner.
Car, indubitablement, le départ hâtif de cet être qui est le centre de votre univers laisserait un vide bien difficile à combler.
Nooran Rezayi, la victime, avait 15 ans. C’était un bébé. Du moins le bébé de son père, comme l’a décrit ce dernier en entrevue. Le jeune n’avait aucune arme à feu sur lui, donc ne représentait pas une menace pour la police.
Faux.
Pour certains individus de la société occidentale, plus particulièrement les policiers blancs, ceux et celles qui ne leur ressemblent pas sont perçus comme des gens ayant des comportements menaçants.
Ce sentiment de menace accru provient de préjugés et de stéréotypes, ce qui contribue fortement à l’usage de la force quand la police interagit avec des jeunes des communautés noires, arabes et latinos.
Un « mur de Berlin » entre la police et les communautés ethniques
Vous souvenez-vous de l’affaire Freddy Villanueva ? Ou encore d’Anthony Griffin ?
Anthony Griffin, un jeune Noir, n’avait que 19 ans quand Allan Gosset, un policier blanc, lui a logé une balle dans la tête, en 1987.
D’après les dires d’un ancien collègue de Gosset, celui-ci avait l’habitude de traiter les Noirs qu’il arrêtait de « maudit nègre », comme bon nombre de policiers, d’ailleurs.


Quant à Freddy Villanueva, le 9 août 2008, pour utiliser une expression anglaise, les policiers s’attendaient à un « Walk in the park » quand ils se sont présentés aux abords du parc Henri-Bourassa, à Montréal-Nord, afin d’interpeller un groupe de jeunes qu’ils soupçonnaient de jouer aux dés, ce qui va à l’encontre d’un règlement municipal.
Une fois de plus, l’histoire s’est répétée, et le policier Jean-Loup Lapointe a tiré sur Freddy Villanueva, l’ayant atteint mortellement. Une mort qui aurait pu être évitée.
Il est d’autant plus triste de savoir que les policiers Allan Gosset et Jean-Loup Lapointe n’ont jamais été accusés criminellement pour leur « bavure », alors que, dans les deux cas, le rapport d’enquête du coroner a démontré que les policiers n’auraient pas dû utiliser leur arme à feu.
Après l’affaire Anthony Griffin, le gouvernement du Québec avait promis de mettre en œuvre des changements visant à améliorer la relation entre les policiers blancs et les personnes des communautés ethniques.
Or, 38 ans plus tard, on constate que cette promesse est de la bouillie pour les chats.
Trois ans après la mort de Griffin, soit en 1990, Leslie Presley, un homme d’origine jamaïcaine, est tombé sous les balles d’un policier, et Marcellus François, un autre homme noir, a subi le même sort en 1991.
Ces changements ne sont jamais venus.
D’après moi, il existe un « mur de Berlin » entre la police et les communautés ethniques.

Dans une société où des chroniqueurs renvoient une écrivaine (Kim Thúy) à sa terre d’origine parce qu’elle a lancé un cri du cœur et une critique à l’adresse de son pays d’adoption, il est difficile d’être optimiste.
Une lectrice m’a même rapporté que son ado de 13 ans craint pour son avenir, et que ces nouvelles l’affectent beaucoup.
C’est compréhensible, car, cette histoire se répète à maintes et maintes reprises : un ado non armé tué par la police.
Une histoire redondante.
Et si la tendance se maintient, la répétition de ces bavures policières en diminuera la gravité et les conséquences.
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3 Commentaires
Malheureusement nous vivons dans une civilisation de la violence. Les gens parlent mal, les gens parlent brutalement et ceci a tous les niveaux. Le racisme est a la fois brutal évident et subtile. ce racisme est parfois subtilement encouragé par les personnes en situation d’autorité. L’histoire se répète pas surprenant. Triste et désolant. c’est tout le système qu’il faut revoir.
J’arrive pas à trouver les mots
La violence de ce policier ne s’est pas déclarée avec l’assassinat de cet adolescent. Il y avait des signes avant coureurs. Quelqu’un le savait, quelqu’un a vu son comportement inadéquat et a fermé les yeux.